La loyauté est un comportement complexe, qui, à l’extrême, peut être considéré comme une vertu. Or, avec un regard d’analyste transactionnel, nous pouvons remettre en question un certain nombre d’idées reçues.

Faire preuve de loyauté, ou être loyale, vient du latin legalis qui signifie « se conformer à la loi ». Le sens moderne attribut la notion d’honnêteté à la loyauté. Alors est-ce être malhonnête que de cesser d’être loyal ? Ne plus être loyal signifie-t-il être déloyal, voire trahir ?

Un contrat se passe dans l’Adulte

« J’ai fait la promesse à mon père (ou ma mère), sur son lit de mort, que je m’occuperai de ma sœur ».

Voici des mots qui peuvent être lourds de conséquences.

Il y a en AT un concept fondateur qui se nomme le contrat. Passé dans l’Adulte, le contrat permet d’agir en protégeant les personnes. Pas d’action sans contrat.

Claude Steiner a présenté 4 conditions pour qu’un contrat soit éthiquement valable.

  • Le consentement mutuel. Les parties prenantes doivent être consentantes. Ici la promesse faite au presque défunt implique une tierce personne, absente. Est-elle consentante pour être prise en charge ?
  • L’obligation réciproque. Que fera ma sœur en contrepartie du temps que je vais lui consacrer ? Que fera mon père, depuis l’au-delà, pour me remercier si je tiens ma promesse ?
  • La compétence. Suis-je compétent « ici et maintenant » pour m’engager dans une telle promesse, aveuglé par la tristesse ?
  • L’objet légal. Est-ce que je peux légalement décider de ce que doit être la vie de quelqu’un d’autre ?

Si ces 4 conditions ne sont pas réunies, la relation entre les personnes sera de l’ordre du jeu psychologique. Mieux vaut alors ne pas tenir sa promesse pour préserver sa santé.

Envers qui suis-je loyal ?

« Telle personnalité politique quitte son parti après plus de 20 ans d’engagement pour rejoindre tel autre parti »

Les noms des personnalités politiques ne manquent pas. Que ce soit un départ du parti socialiste, LR ou tout autre. Prenons l’exemple de Manuel Valls qui a quitté le gouvernement de François Hollande puis le parti socialiste. TRAITE ! Ce sont exclamés les fidèles.  Quitter, est-ce trahir ? La visée d’un thérapeute, analyste transactionnel, est d’accompagner ses patients vers l’autonomie. Donc, de quitter leur scénario. Du point de vue de l’AT, rompre une relation serait plutôt faire preuve de lucidité que de trahir. La traitrise serait d’apporter des informations confidentielles, tel un espion, au nouveau parti rejoint. Fut-ce le cas de Manuel Valls ? Sur un plan personnel, lorsque qu’un couple se sépare, la traitrise serait de diffuser des images à caractère pornographique de son ex-conjoint(e) sur les réseaux sociaux.

Au fond se pose un dilemme : envers qui suis-je loyal ?

Envers moi et mon honnêteté intellectuelle ou envers l’autre, avec qui j’ai passé un contrat, il y a fort longtemps.

Il a pu être en bonne et due forme, indéterminé, il n’en est pas moins révocable. Un contrat est passé à une date spécifique où toutes les conditions pour être bien ensemble, professionnellement ou personnellement, sont réunies. Mais 10 ans après, le monde a changé, les personnes ont changé. Il est normal que ce qui était parfaitement bien avant ne le soit plus aujourd’hui. L’engagement pris un jour est d’ailleurs la raison du désengagement d’un autre jour. La loyauté se fait d’abord vis-à-vis de soi. Si mon partenaire, dans son évolution, a pris une route différente de la mienne, la séparation devient inévitable.

Quand la loyauté est une emprise

La loyauté aux autres peut devenir une symbiose, en langage courant, une emprise.

Il s’agit de se mettre en incapacité de penser et d’agir par soi-même, de peur de décevoir donc de ne rien faire ou de regarder ailleurs quand la situation ne convient plus. Cette attitude relève d’un comportement passif, l’abstention, pour maintenir la symbiose.

Dans quelques jours débutera le procès en destitution de Donald Trump, « l’impeachment ». Dix membres du parti Républicain ont voté en sa faveur. Ont-ils trahi ou sont-ils restés fidèles à leurs valeurs ? Que feront-ils à l’heure du vote ? Seront-ils loyaux envers eux-mêmes ou envers celui qui fut leur leader ?

En conclusion, il est important de différencier loyauté et allégeance et de se demander si les engagements passés ne s’opposent pas à l’autonomie d’aujourd’hui.