Une épistémologie de « OK » en AT

Les positions de vie

C’est au chapitre 12 du même ouvrage[1], « la classification des positions de vie », que nous entrons dans une signification propre à l’AT. Les 4 positions de vie, qui vont conduire à des considérations sur soi et les autres.

  • Je suis OK / Tu es OK
  • Je suis OK / Tu n’es pas OK
  • Je ne suis pas OK / Tu es OK
  • Je ne suis pas OK / Tu es OK

C’est un regard sur la valeur intrinsèque que chacun s’accorde et accorde aux autres. Là encore, « OK » se rapporte à une analyse structurale. Ces positions fondamentales vont entrainer des comportements spécifiques et cohérents avec les représentations que chacun a sur soi, les autres et le monde en général.

Prenons par exemple Clara, dont la position fondamentale est « je suis OK / Tu es OK ». Elle va se comporter da manière respectueuse, prenant soin d’elle et des gens qu’elle rencontre. Mais Clara peut rencontrer Jérémy, au hasard d’une soirée chez des amis, dont la position est « Je suis OK / Tu n’es pas OK ». Jérémy se permettra un geste déplacé à l’encontre de Clara qui s’en trouvera troublée et déconcertée. À chaque rencontre, la position de vie choisie par chacun permettra de trouver des points de convergence ou de divergence chez l’autre. Les comportements constructifs se manifesteront chez les individus qui partagent les mêmes considérations et des points de vue convergents, à partir d’une position : Je suis OK / Tu es OK.

Une personne dont la position de vie est « je suis OK / tu es OK » acceptera les autres tels qu’ils sont, indépendamment de leur propre position. Mais à moins d’être psychothérapeute ou dans un métier d’accompagnement, à plus ou moins long terme les relations risquent de se dégrader avec ceux qui ont une vision négative d’elles-mêmes ou des autres.

Nous représentons les positions dans une grille proche de « l’enclos OK » de Ernst[2] pour observer la distance des points de vue entre les personnes. Nous graduons les axes du tableau avec une échelle arbitraire qui va de 0 à 100, en valeur absolue. Cela signifie que la valeur intrinsèque attribuée, à soi et aux autres, est propre à tout individu. Même si deux personnes ont des positions de vie similaires, leurs pensées, émotions et comportements, au regard d’un même événement, sont (heureusement) différents.

Par exemple, dans cette grille, Pablo a une position « je ne suis pas OK / Tu es OK » élevée. Il se dévalorise fréquemment devant des figures d’autorité qu’il va mettre sur un piédestal. Mais parfois, il arrive à surmonter son appréhension et dire ce qu’il ressent à son chef. Béatrice a une position « Je suis OK / Tu es OK » mais a aussi un regard très critique sur les injustices commises dans le monde qui pourrait la conduire vers des comportements agressifs. Elle en a conscience et sait se maitriser. Lisa, avec une position de vie similaire à celle de Béatrice, montrera plus de distanciation et d’acceptation dans ses réactions face à un même événement.

Julien a du mal à comprendre Antoine, qui voit la vie en noire. Il aura tendance à jouer des jeux dans un rôle de Persécuteur avec Antoine et Sauveteur avec Pablo.

Lisa et Béatrice s’entendent parfaitement bien. Elles savent se parler pour se dire ce qui va comme ce qui ne va pas. Lisa a essayé à plusieurs reprises de montrer les points positifs de la vie à Antoine mais rien n’y fait. Elle se sent lasse et met de la distance dans sa relation avec lui.

Nous pourrions décrypter de nombreuses relations, y compris les  jeux psychologiques, à partir de cette matrice. Chacun pourra s’autoévaluer et positionner ses proches pour mieux comprendre les processus relationnels, en gardant à l’esprit que cet exercice est un point de vue sur soi et les autres et n’est pas une vérité.

OKness

 Ce néologisme est de Berne lui-même. On le rencontre pour première fois à la page 268 de « principes de traitement thérapeutique en groupe » et nous pourrions le traduire par la capacité à s’accepter et accepter ce que disent, pensent, ressentent les autres. Nous ne sommes plus dans une décision structurale mais dans une approche relationnelle. Ce ne sont plus seulement des projections construites à partir de sa position existentielle, sur ce qu’est ou devrait être la vie, mais des réactions à des stimuli. L’OKness se façonne au fil des rencontres et comme Ernst l’a expliqué, « aller de l’avant avec l’autre », c’est à dire se mettre dans une disposition de coopération, contribue aussi à modifier sa position et à se rapprocher de « je suis OK / Tu es OK ».

[1] Eric Berne – Principes de traitement psychothérapeutique en groupe – Ed AT

[2] Franklin Ernst – L’enclos OK une grille « pour aller de l’avant avec l’autre » – CAAT 1